Posté par
Flora
Rencontre avec Sylvie Ferrando, auteur des » Les vies aléatoires «
Pourriez-vous introduire, en quelques mots, votre ouvrage ?
Les Vies aléatoires est mon deuxième roman, après Déserts, paru en 2012. Contrairement à Déserts, qui est un roman familial de l’expatriation, il s’agit là plutôt d’une fable utopique, éclairée par l’exergue de la première page : « Le jour où la poule eut des dents ». Cette phrase fonctionne comme un emblème de la problématique du livre, qui est de savoir si les événements qui nous arrivent relèvent du pur hasard ou sont inscrits en germe dans notre passé. Six personnages illustrent ce questionnement, six personnages de nationalités et de milieux différents, qui se retrouvent ensemble sur le vol Berlin-Moscou, un jour de juin, et qui ressentent les pseudo-effets d’un chargement de pesticides libérés dans l’atmosphère par erreur. En même temps, au sol, en Russie, un fermier se rend compte qu’une de ses poules est dotée de dents ! On se demande donc si ce qui va se produire dans la suite du roman, une fois les passagers arrivés à Moscou, est dû à l’inhalation des pesticides, susceptible d’entraîner des mutations diverses, dont certaines d’ordre génétique, ou si cela n’était que la suite nécessaire et logique de leur destinée…
Pourquoi avez-vous choisi de traiter d’un sujet aussi grave, celui de l’accident aérien ?
En fait, dans le roman, il n’y a pas d’accident aérien. Les deux avions s’évitent au dernier moment, et une série d’événements bizarres, que j’ai nommés anomalies, s’ensuit.
Se rapporte-t-il à un pan particulier de votre vie ?
Pas du tout, tous les personnages et la grande majorité des situations sont sortis de mon imagination, et j’ai essayé de placer dans le roman de la fantaisie et des situations inédites, incongrues, donc plutôt de travailler sur un mode comique.
A travers le destin de ces personnages, cherchez-vous à donner une tonalité particulièrement pathétique, tragique à votre intrigue ?
On peut ressentir de la sympathie, de la compassion pour certains personnages, dont le passé n’est pas toujours simple et heureux, comme l’hôtesse de l’air et le petit garçon surdoué. Cependant, malgré les risques, les dangers, les aléas auxquels il est soumis, pour aucun personnage l’histoire ne tourne mal, sauf peut-être pour le prix Nobel, qui est sujet au vieillissement (naturel ?)… Chacun de ces personnages éprouve des difficultés à un moment de sa vie, qui trouvent une forme de résolution partielle à Moscou.
Croyez-vous à la fatalité ?
C’est une question que je n’ai pas complètement résolue, même après l’écriture du roman. Le livre se contente de poser la question, à chaque lecteur de décider quelle est la part de hasard ou de liberté totale dans la destinée humaine et quelle est la part de déterminisme, qu’il soit social, affectif, professionnel, quelle est la part de nécessité dans l’existence. Un hasard nécessaire serait une bonne définition de la fatalité, si elle existe…
A travers ce titre de Vies aléatoires, voulez-vous montrer que l’existence ne peut tenir qu’à un fil ?
Non, ce que je veux montrer, c’est qu’il y a un enchaînement des circonstances, et des prises de décision, des prises de risque qui se font à certains moments et qui jouent le rôle d’accélérateurs de changements, de destins. Ce que je veux montrer aussi, c’est que ces prises de décision se font dans l’interaction avec les autres vies, dans le croisement des aléas de la vie des autres personnages, dans les rencontres.
Cherchez-vous à souligner le caractère éphémère de l’existence ?
Pas particulièrement. En replongeant dans les racines, dans le passé de chacun des personnages, je pense que je montre bien que les destinées s’inscrivent dans la durée. Et que la construction d’une personnalité, d’un personnage, se fait par strates, par paliers successifs.
Un dernier mot pour vos lecteurs ?
Oui, la vie est belle et il faut rester optimiste, quoi qu’il arrive… Je leur souhaite une belle lecture…