Posté par
Guillaume
Rencontre avec Claire Voy, auteur de « Les Revenants »
Présentez-nous votre ouvrage ?
Les Revenants est un roman épistolaire, historique et fantastique, qui se déroule en France, principalement dans les années 1830. Mêlant l’intimité de la correspondance privée à la chronique politique du temps, il exhale une certaine nostalgie classique, diffuse une odeur d’un autre siècle, à l’instar de ces vieux livres en cuir des temps passés.
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
L’envie, ou plutôt le besoin m’est venu de l’écrire, tandis que je travaillais sur un ouvrage d’histoire et de politique. Je souhaitais mettre en scène, faire vivre ces personnages de l’histoire, plus librement : le roman a cet avantage que n’a pas l’essai. Et cela faisait des années que je rêvais d’écrire un roman épistolaire (j’avais reçu une « claque » salutaire en lisant Les liaisons dangereuses et la Nouvelle Héloïse). Sur le plan du style, j’étais un peu lasse des textes contemporains, relâchés et minimalistes ; je voulais un ton différent. Cependant, le style précieux m’insupportait trop pour que je tentasse, maladroitement de surcroît, d’en enrichir le corpus d’un volume. Je me souvins alors de deux conseils aux auteurs, gracieusement prodigués par ces deux génies de la littérature que furent, que sont à jamais, Proust et Flaubert : respectivement, s’entraîner à écrire des pastiches, et chercher le détachement vis-à-vis de ses personnages, la discipline d’une froide objectivité. Je pris la plume et me fis donc violence, en prêtant à mon héroïne une manière de penser et de transcrire ses émotions assez éloignée de ma nature… Le livre est également un hommage à la maison dans laquelle je vécus, enfant. Elle était auréolée de légendes qui ont sans conteste façonné durablement les contours de mon imagination.
À quel lecteur s’adresse votre ouvrage ?
Le contexte classique de mon roman autorise, paradoxalement, un grand nombre de variations : le canevas étant déjà préparé, il n’y a plus qu’à broder les ornements, ciseler les arabesques. Le résultat est un texte qui, par son atmosphère, paraîtra familier aux amateurs de romans épistolaires et de romans gothiques (Jane Austen, Mary Shelley, Ann Radcliffe sont d’ailleurs explicitement mentionnées dans le texte, par une mise en abîme où la fiction rend hommage au réel… et à la fiction), tout en étant atypique. Le parcours chaotique de l’héroïne, déchirée entre des idéologies et époques très différentes (monarchie absolue, Révolution, Empire, monarchie constitutionnelle), n’est pas étranger au ton singulier de la narration, à cheval sur deux mondes, à la fois « Ancien Régime » et déjà moderne.
Quel message avez-vous voulu transmettre à travers ce livre ?
Sur le plan moral, mon ouvrage procède d’interrogations plus que d’affirmations. Tout simplement parce que je n’ai pas moi-même (hélas ?) la réponse aux questions spirituelles et temporelles qui me, qui nous taraudent : qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Les personnages de mon livre ont l’orgueil de croire que, s’ils ne comprennent certes pas pleinement l’évolution de leur environnement, ils en saisissent au moins une partie. Leurs vicissitudes achèveront de saper leurs fondations sociales et leurs certitudes existentielles… Les Revenants, en figurant des conceptions différentes de l’histoire, du progrès, de la modernité, pèse le pour et le contre, et invite le lecteur à la circonspection : et vous, qu’auriez-vous fait durant une situation extraordinaire, comme le fut la Révolution ? Auriez-vous vraiment eu le choix de votre destinée, si vous aviez été de telle condition socioéconomique, si vous aviez vécu dans telle région, fréquenté telle sensibilité politique ? Le roman s’achève par un bal, dans la veine du Bal des vampires de Polanski. Volontairement équivoque, il semble néanmoins suggérer avec prégnance au lecteur qu’on n’attend pas toujours le Jugement dernier pour solder ses actions : il arrive qu’une justice immanente nous fasse payer, sur terre, nos errements…
Quels ouvrages ou quels auteurs vous ont particulièrement inspiré pour écrire cet ouvrage ?
Le Tour d’écrou d’Henry James, les romans gothiques des auteurs susmentionnés, Lovecraft, mais également Madame Bovary de Flaubert, les romans de Colette, de Sophie Cottin, le Montesquieu des Lettres Persanes, la Religieuse de Diderot, les contes de Voltaire, les Mémoires de Madame la marquise de La Rochejaquelein.
Quels sont vos projets d’écriture pour l’avenir ?
Un ouvrage de comédies et de dialogues humoristiques est achevé d’écrire ; il devrait paraître avant Noël.
Un dernier mot pour les lecteurs ?
À bientôt, tout simplement !