Posté par
AA Victoria
L’expression de la semaine : Faire son miel de…
«Faire son miel de…»
ORIGINES
Savez-vous que les abeilles sont de viles profiteuses ? Elles exploitent de pauvres fleurs dans défense, sans même leur demander leur autorisation, et en retirent le nectar et le pollen qu’elles ramènent ensuite dard-dard[1] à leur ruche.
Une fois de retour, pour fabriquer ce miel dont on se régale, la butineuse transfère le nectar à une autre abeille qui l’avale et le régurgite à plusieurs reprises dans le but d’en éliminer l’excès d’eau et de le rendre plus riche en protéines et plus épais, en s’aidant de l’invertine (ou invertase), une enzyme qu’elle sécrète et qui modifie les sucres présents dans le nectar.
Ensuite, les abeilles continuent à l’assécher en jouant les ventilateurs avec leurs ailes, avant de le déposer dans une cellule qui est scellée et dans laquelle la transformation continuera jusqu’à donner ce fameux miel.
En résumé, donc, si on oublie qu’ensuite, c’est l’homme qui joue lâchement les profiteurs en récupérant ce miel qu’elles ont mis du temps à fabriquer et qui est normalement destiné à leur servir de réserve de nourriture, on peut dire que les abeilles profitent des fleurs pour en faire leur miel.
En faut-il vraiment plus pour expliquer notre métaphore où les fleurs sont remplacées par toutes choses dont on sait extraire un ‘miel’ ou quelque chose de convoité ou de profitable ?
Ici, il ne faut pas voir le ‘profit’ sous l’aspect uniquement pécuniaire qu’on associe souvent au mot, car il peut tout aussi bien être physique ou intellectuel.
Si la date d’apparition de l’expression ne semble pas précise, on trouve des écrits du XVIe siècle qui comparent déjà le comportement de ceux qui savent tirer profit de certaines choses à celui des abeilles et de leur miel.
[1] Les puristes diront qu’on parle plutôt d’aiguillon, mais « ramener aiguillon-aiguillon à la ruche », ça le fait moins.
Exemple « Il ressemble à l’abeille, laquelle tire son profit de toutes fleurs pour en faire son miel »
Amadis Jamyn – XVIe siècle
« Lire, en effet, bien lire est avant tout comprendre; puis c’est juger, et s’approprier les pensées d’un auteur; c’est en faire son miel, à la manière de l’abeille, et les déposer, pour les y garder, dans le plus pur de son âme. »
Édouard Charton – Le magasin pittoresque vol. 30 – 1862